RYTHMES
Le rythme en musique est l'alternance d'événements sonores et de silence de durées variables, créant une séquence répétitive.
La signature rythmique définie la structuration de la musique en mesures et temps de durées égales.
Dans la musique occidentale, la signature rythmique est identifiée sur la partition par 2 chiffres superposés. Celui du haut désigne soit le nombre de temps (pulsations) de durée égale dans la mesure si rythme binaire avec chiffre non divisible par 3, ou le nombre de tiers de temps si rythme ternaire avec chiffre divisible par 3. Le dénominateur désigne la valeur relative de durée par rapport à une ronde qui est la note de plus grande durée. Chaque signature rythmique correspond à une alternance de temps forts et faibles (par exemple rythme binaire à 4 temps de signature 4/4 avec 4 noires et temps forts 1 et 3, rythme ternaire à 2 temps de signature 6/8 avec 2 noires pointées équivalentes à 2 groupes de 3 croches et temps forts 1 et 2) dont le schéma répétitif et la façon de compter ces temps caractérise ce que l'on appelle le mètre.
Les signatures rythmiques peuvent être différentes que 4/4 (par exemple 2/4 pour les marches, 3/4 pour les valses, mazurkas, javas, etc..., avec découpage binaire, 6/8, 9/8, 12/8 avec découpage ternaire) ou avec accentuation des temps forts 1 et 3 en musique classique, ou des temps faibles 2 et 4 (en after beat) par exemple dans les musiques d'origine afro-américaines, en jazz avec les cymbales charleston (hi-hat), en rock ou disco avec la caisse claire, en plus du battement de grosse caisse sur temps 1 et 3 en rock et sur les 4 temps four on the floor en pop, funk, et disco, avec également un battement de charleston à la croche tous les temps et 1/2 temps, voire à la double croche en rock classique ou hip-hop, avec du swing créé par des croches de durée différenciée en Jazz (avec en plus une improvisation possible et le plus souvent des accords de 7eme et un mode dorien).
Ne pas confondre la signature rythmique qui donne un rythme isochrone structurant avec des temps forts et faibles de durées égales sur lesquels s'articulent par exemple les changements d'accords, avec le rythme ressenti qui peut accentuer certains temps avec une augmentation d'intensité, de durée, voire une différence de timbre, en formant un motif ou une figure rythmique avec une dynamique et une sensation spécfique (groove) parfois liée à la façon de jouer avec par exemple un rythme binaire remplacé par du ternaire avec 2 croches séparées par un demi soupir non joué et remplacé par une prolongation de la 1ère croche, de durée double (2/3 de la croche suivante) dans le shuffle, ou de durée variable dans le swing, celui étant caractéristique du jazz, notamment sur le temps 4 en signature 4/4.
Un motif rythmique est perçu lorsqu'une série de sons courts successifs, y compris lorsque ces derniers se suivent à intervalles temporels égaux, ont une différence de durée, de hauteur, de timbre, ou d'intensité qui forment une organisation périodique. Une mélodie jouée avec un seul instrument, sans accompagnement, ni basse, ni percussion, avec des durées identiques entre notes, constitue donc aussi un rythme dont les hauteurs de notes les moins fréquentes peuvent être perçues comme les battements les plus forts.
La polyrythmie, le plus souvent d'origine africaine et liée aux mouvements corporels, peu utilisée dans la musique classique occidentale, consiste à jouer de façon simultanée des rythmes différents en terme de vitesse, motif, succession d'accent, ou longueur, avec au moins un début de pulsation simultané à chaque mesure.
Lorsqu'on superpose un rythme ternaire et un rythme binaire, on parle d'hémiole (notamment dans la musique baroque) avec un rapport de 3/2.
Les motifs rythmiques peuvent être représentés :
- de façon linéaire par une succession de symboles (X ou 1 pour un battement, . ou 0 pour un silence), chaque symbole correspondant à la durée d'une pulsation, par le nombre de pulsations entre chaque battement successif, ou par les n° d'ordre croissant des pulsations avec battement.
- dans un diagramme circulaire d'horloge (comme un collier, avec des boules noires pour les pulsations avec battement, et boules blanches pour les pulsations sans battement, avec sens horaire et démarrage sur la graduation du haut)
- dans un diagramme en boîte, avec une succession de cases représentant chacune la durée d'une pulsation, avec un point dans la case pour les pulsations avec battement
- sur une partition par les intervalles entre battements correspondant chacun à la durée de la note, et du silence le cas échéant, jusqu' au début de la note suivante (pouvant être de durée, de hauteur, et de timbre différent).
Différents motifs rythmiques :
Les rythmes euclidiens ont des intervalles entre battements les mieux répartis possibles sur la totalité des temps ou subdivisions de durée égale et sont uniques avec une désignation de type E (nombre de battements, nombre de subdivisions), correspondant à une succession binaire de 1 (subdivision avec battement) et de 0 (subdivision sans battement).
Les musiques traditionnelles du monde ont souvent des rythmes euclidiens ou des variantes de ces derniers en fonction de la position du 1er battement et du sens de lecture de la séquence. Si le nombre de battements est supérieur à un (rythme non trivial) et premier par rapport au nombre de subdivisions, on obtient des rythmes non périodiques très dansants qui sont souvent d'origine orientale et surtout africaine, ces derniers et leur complémentaire (si on inverse les battements et silence) étant très utilisés dans la musique latino-américaine avec un nombre total de subdivisions multiple de 4, un nombre de battement impair, une différence du nombre de subdivisions entre battements limitée à 1, comme dans les exemples ci-après avec une désignation compacte donnant le nombre de subdivisions entre chaque battements successifs :
- 332 (tresillo) et 21212 (cinquillo) à Cuba et pour le tango argentin
- 2212221 (bembé) et 32322 (venda) en Afrique
- 33433 et 12121212112 pour la bossa nova
- 3223222 et 212221222 pour la samba
De nombreux rythmes non périodiques latino américains ne sont pas euclidiens ou dérivés :
- 3122, avec 8 subdivisions comme le tresillo et le cinquillo), rythme répété sur 2 mesures de la Habanera, danse cubaine lente
- rythmes à 5 battements (comme la bossa nova) et 16 subdivisions (comme la bossa nova et la samba) :
. 34324, avec rythme de la rumba
. 33424, rythme "son" (fils) utilisé dans la salsa, le rockabilly, et beaucoup d'autres
Chaque rythme asymétrique (euclidien ou non) d'origine africaine et couvrant 2 mesures successives avec 3 notes créant une tension sur une mesure, suivie ou précédée de 2 notes donnant une détente sur l'autre mesure, est appelé une clave dans la musique latino américaine, suivant des polyrythmies le plus souvent très syncopées. Les claves désignent aussi les 2 cylindres de bois formant l'instrument de percussion.
Exemple d'une clave 3/2, la clave "son" (fils) :
1 . et . 2 . et . I 3 . et . 4 . et .
X . . X . . X . I . . X . X . . .
ce qui peut être traduit par 2 motifs superposés sur une même durée de 16 subdivisions égales avec d'une part des intervalles égaux de 4444 (pulsations de la signature rythmique) et d'autre part les intervalles de la clave son de 33424 qui deviendrait des intervalles inégaux de 3122224 si on ne différenciait pas les 2 rythmes par la note, le timbre ou l'intensité.
Le rythme "son" (fils) est un des meilleurs rythmes en fonction de certaines propriétés géométriques, dont les suivantes facilement observables sur un diagramme circulaire en horloge :
- 16 subdivisions suffisantes et restant facile à percevoir car multiple de 2 et compatibles avec une signature rythmique binaire et avec une durée inférieure à 2 s
- 5 battements suffisants en terme de complexité et permettant avec 16 subdivisions une répartition non uniforme des intervalles mais avec un équilibre entre le nombre de subdivisions et de silences
- répartition presque uniforme des intervalles entre battements, la référence étant pour cette propriété le rytme euclidien 33334 et celui de la bossa nova 33433 au déroulé identique mais point de départ différent
- absence de battement à intervalles identiques (diamétralement opposés sur un diagramme en horloge)
- similarité du contour géométrique reliant les points de battement, avec celui reliant des points situés à mi-chemin des battements), avec une variation similaire de la longueur des côtés (0, +, -, +, - dans le sens horaire), contrairement au rytme euclidien 33334 et à celui de la bossa nova
- au moins 2 intervalles initiaux identiques et différents des autres imposant un effet d'accoutumance puis de surprise (rupture de l'effet prédictif), contrairement au rythme de bossa nova 33433 dont les 2 derniers intervalles sont identiques aux 2 premiers
- équilibre dans la quantité d'intervalles différents (2 de 3, 2 de 4, 1 de 2), contrairement au rythme euclidien
33334 et à celui de bossa nova (4 de 3, 1 de 4)
- différence suffisante dans les valeurs d'intervalles (2 et 4), contrairement au rytme euclidien et celui de bossa nova (3 et 4)
Certaines musiques polyrythmiques très syncopées peuvent avoir une signature et un motif rythmique de basse qui est binaire comme le ragtime créé au début du 20eme siecle, d'origine afro-américaine et popularisé notamment par le titre "The Untertainer" de Scott Joplin qui est un classic rag écrit en 2/4 comme une marche, avec une pompe qui est une alternance de basse et d'accord, associé à une mélodie accentuant les temps faibles.
Les rythmes marqués du flamenco andalou (compás) ont généralement 12 temps où subdivisions avec 4 ou 5 accentuations dont le départ n'est pas toujours sur la première subdivision :
- fandango : accentuations sur 1, 4, 7, 10, avec des intervalles équidistants entre battements de 3333
- soleá : accentuations sur 3, 6, 8, 10, 12, avec des intervalles de 33222
- bulería : accentuations sur 3, 7, 8, 10, 12 avec des intervalles de 34122
- seguiriya : accentuations sur 1, 3, 5, 8, 11 (rotation par rapport à la soleá)
- guajira : accentuations sur 1, 4, 7, 9, 11 (rotation par rapport à la soleá)
Les rythmes flamenco sont joués au pied par les danseurs, avec des claquements de mains (palmas), des coups sur la table, des castagnettes, et des percussions comme le tambourin et le cajón. Le chant du flamenco se distingue par des mélismes (plusieurs notes chantées sur la même syllabe), un accompagnement à la guitare, avec une mélodie ne suivant pas strictement le motif rythmique.
Le boléro espagnol est une danse avec une signature rythmique 3/4 et un motif rythmique répétitif avec 24 subdivisions et 12 battements avec intervalles de 411114111144.
Le boléro de Maurice Ravel a également une signature rythmique 3/4 mais un motif rythmique sur 2 mesures avec 30 subdivisions et 24 battements avec intervalles de 211121112221112111111111.
Le boléro cubain a en revanche une signature rythmique 2/4 avec un motif rythmique de cinquillo 21212 pouvant être associé à un tressilo 332.
Les chansons très connues "Besame mucho" de Consuelo Velázquez et "Et maintenant" (de Bécaud) sont des boléros avec une signature rythmique en 4/4.
Le cha cha cha, issu du mélange du danzón, du són cubain et du mambo, mais plus facile à danser car avec des pas marqués sur le temps et non plus sur la syncope, a une signature rythmique binaire avec 16 subdivisions, une accentuation en 1, 5, 9, 13, 15 (intervalles successifs de 44422), et une pulsation en 2, 4, 6, 8, 10, 12, 14, 16 (intervalles équidistants), le rythme pouvant être joué par des accords sol do mi, à l'octave inférieure pour la pulsation.
La ballade, qui peut être une pièce pour piano ou une chanson populaire assez lente et mélodieuse, poétique, à caractère sentimental ou mélancolique, a un motif rythmique de base avec des intervalles successifs de 3-1-4.
Le tempo est souvent lié au genre musical et à la signature rythmique, par exemple :
. 50 bpm pour le tango
. 120 bmp et plus pour le rock et dérivés
. jusqu'à 240 bpm pour le rythme de bulería (flamenco)
. en fonction du mouvement ou du morceau dans la musique classique
. avec accélération dans certaines chansons russes (par exemple Kalinka)